Techniques de gestion différenciée avantages inconvénients

Commençons directement cet article par un fait important à garder à l’esprit :

La gestion différenciée s’applique à n’importe quel type d’espaces :

  • espaces verts
  • cimetières
  • jardin de particuliers
  • bords de route
  • zones industrielles…

Enfin, vraiment partout !

Je suis Liv Geyer, directrice de l’école Blue Eco Formations, et lorsque nous avons mis en place la gestion différenciée dans des zones naturelles et urbaines, cela a soulevé beaucoup de défis. Au début de chaque projet, voici les questions que l’on me posait :

  • Que peut-on mettre en place ?
  • Quelles sont les meilleures techniques de fauches ?
  • Est-ce qu’on peut se passer du désherbage ?
  • Cela va prendre plus de temps qu’avant ?
  • Le rendu n’est pas trop sauvage ? 
  • Comment satisfaire tous les usagers de la zone ?

Tous ces questionnements sont légitimes.

Et vous verrez que, dans une démarche de gestion différenciée, tout problème a plusieurs solutions qui s’offrent à lui.

Dans l’idéal, je réalise un diagnostic de biodiversité avant d’aborder la Gestion différenciée de l’espace en question. C’est pour moi un élément incontournable et je vais vous expliquer en quoi cela consiste. D’ailleurs, c’est généralement dans cette étape que l’on s’aperçoit que le sol manque de nutriment, de biodiversité, ou bien qu’il est mort.

Nous réalisons donc un diagnostic de sol pour investiguer sur son état de santé et trouver d’éventuels polluants. Mais ceci est un autre sujet, poursuivons sur la Gestion Différenciée avec un rapide rappel des bases concernant l’utilisation de produits phytosanitaires.

(Complément d’informations : la démarche de création de haies pour pollinisateurs est complémentaire. Vous trouverez à cet effet des excellents guides spécialisés par région sur le site de Pollinis).

1) La loi “zéro phyto”

Depuis 2020 les collectivités ne peuvent plus utiliser de pesticides pour l’entretien des voiries, des talus, des espaces verts, des promenades ou encore des forêts. L’interdiction s’applique aux « personnes publiques ».

Voici un article résumant cet objectif dit  » Zéro Phyto » et voici un article d’une préfecture précisant les dispositifs légaux s’y référant (la loi Labbé et Pothier) avec son guide qui va avec.

Le texte adopté précise que le non-respect de ces dispositions entraînera des sanctions pénales (jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende).

Plutôt incitatif n’est-ce pas ? 

Cette mesure n’a pas été prise au hasard.

Grâce à de nombreuses études, on sait maintenant que les pesticides ont des effets aigus et latents sur la santé.

Les utilisateurs directs des produits phytosanitaires déclarent des maladies de peau, des vomissements, la maladie de Parkinson, le cancer de la prostate et certains cancers hématopoïétiques. 

Toutes personnes exposées indirectement, proches des champs arrosés par ces produits, ou les consommateurs des aliments récoltés, sont aussi touchés par ces complications.

Cette interdiction de l’utilisation des produits chimiques a d’autres bienfaits :

  • La biodiversité est préservée
  • La santé est préservée 
  • Le lieu épargné est valorisé auprès du public.

Mais il y a un couac…

Désormais, si on ne peut plus avoir la même gestion d’un espace vert par le retrait des herbicides et des pesticides, le temps de gestion sera au minimum 3 fois plus long !

Alors comment gagner du temps ? En changeant de méthode ! 

Pour abandonner la gestion aux phytos, on propose des alternatives efficaces et meilleures, sur tous les plans.

Avec la Gestion Différenciée, on change la façon de gérer, on favorise la biodiversité et on gagne du temps.

Je vous explique ça plus bas.

2) Qu’est-ce que la Gestion Différenciée ?

Sa définition est simple.

 “La gestion différenciée consiste à pratiquer un entretien adapté des espaces verts selon leurs caractéristiques et leurs usages.”

L’objectif est de proposer de nouvelles techniques de gestion, respectueuses de la santé des usagers et de la biodiversité.

Pour les mettre en place, il est conseillé de réaliser un diagnostic de biodiversité. Cela permet d’année en année de comparer la faune sauvage et la flore, et de constater les évolutions.

Un diagnostic de biodiversité c’est un document qui regroupe de nombreuses données importantes comme :

  • les espèces animales présentent sur cette zone
  • les espèces végétales présentent sur cette zone
  • leurs nombres
  • leur répartition dans l’espace
gestion differenciee arbre

Contrairement aux idées reçues, la Gestion différenciée n’est pas plus chronophage que les anciennes techniques chimiques. 

Je pourrais même rajouter.. que l’on y fait des économies.

Ainsi, le seul inconvénient que l’on pourrait trouver à la gestion différenciée est qu’elle nécessite un temps d’apprentissage. En effet,

Mais sans plus attendre, voici les quelques techniques les plus simples à mettre en place dans vos espaces verts ou dans vos jardins.

3) Techniques de Gestion Différenciée

Le désherbage à la main est vraiment très chronophage. Et le désherbage thermique est tout de même plus long que le désherbage chimique (en plus d’utiliser du carburant et donc de polluer).

La solution ? Ne plus avoir à désherber.

Pour cela, il y a la technique du couvre sol. En plus de faire gagner du temps à l’humain, elle fait gagner du terrain à la nature.

Avant, on installait des bâches noires. De grands géotextiles en plastiques qui ne laissent pas l’eau s’infiltrer, s’effilochent avec le temps et finissent par être recouvert par la végétation. 

Et aussi, c’est très laid.

Voici les techniques alternatives de couvre-sol avec leurs avantages et inconvénients :

  • Paillage organique : la paille, les copeaux de bois, ou même des coques de cacao. En plus d’être très esthétique, cette technique protège les racines du froid, permet l’infiltration de l’eau et ralentit son évaporation. 
  • Paillage minéral : l’ardoise ou les galets, sont très décoratifs et empêchent les adventices de pousser. C’est moins économique que la méthode organique et l’infiltration de l’eau n’est pas aussi bonne. Attention à ne pas recouvrir de trop grandes parcelles.
  • Paillage recyclé : les feuilles mortes, les copeaux ou brouillât, on couvre les zones aux pieds des plantes, le long des allées, etc. Cette solution est très économique et particulièrement efficace car il y a moins de démarches à entreprendre pour la mettre en place.

On peut aussi planter. Sur internet, vous trouverez assez facilement la liste des plantes couvre-sol qui sont adaptées à votre région. Au lieu de faire la guerre au lierre qui grimpe à un mur, prenez-le comme allié pour couvrir le sol. En plus, c’est une plante mellifère (dont le nectar est utilisé par les abeilles pour élaborer le miel), les pollinisateurs l’adorent. Il apporte aussi des baies en hiver pour nos oiseaux et est un refuge pour de nombreuses espèces.

[image : plantes couvre sol + bande de sécurité d’1mètre]

Voici maintenant une autre technique pour tous ceux qui s’occupent de grands espaces (espaces verts ou jardins de particuliers et d’entreprises) :

La tonte différée

Plutôt que de tondre une grande surface. Créer des espaces en fonction des usages.

On appelle cela de la tonte différée dans le milieu. On le combine avec le fauchage tardif.

Comme son nom l’indique, le fauchage tardif consiste à repousser la fauche, de préférence à fin automne pour ne pas détruire les insectes présents dans les hautes herbes. 

Il faut faire des zonages en fonction de leurs usages.

  • Là où les enfants jouent, on tond à 5 cm.
  • Là où les parents observent et se posent, on entretient moins souvent.
  • Autour, on entretient rarement pour laisser la biodiversité s’exprimer.
  • Dans une zone non fréquentée, on installe une ZONE 5.
[Tonte différée]

La zone 5, c’est une bulle écologique où personne ne met les pieds. Rajouter quelques bûches en tas au-dessus d’une cagette retournée. C’est l’endroit rêvé pour les hérissons, ce petit mammifère sur le point de disparaître de France. Encerclé le tout grâce à une petite plate-bande de pierres ou une toute petite palissade de 40 cm de haut pour « réserver » l’endroit.

Lorsque vous coupez la végétation, il est recommandé de ne pas laisser les résidus de fauche sur le terrain. Le but est de laisser un sol appauvri. 

Contrairement à ce que l’on peut penser, un sol appauvri accueille plus de biodiversité qu’un sol riche. 

Je sais ce que vous vous dîtes, ça paraît contradictoire. Mais il y a une explication ! 

Si vous laissez les résidus de fauche au sol, il s’enrichit et les espèces nitrophiles comme les orties apparaissent. Elles recouvrent toute la surface et empêchent d’autres plantes de pousser. Plus le sol est pauvre, moins les espèces nitrophiles (plantes poussant préférentiellement sur les sols ou dans les eaux riches en nitrates) se développent rapidement. Cela laisse le temps à de petites graminées de germer comme le pavot. La biodiversité est donc plus riche avec un sol plus pauvre en nutriment. Voilà. 

La fauche

On recommande aussi de ne pas tout faucher en même temps et de laisser des refuges. 

La façon de faucher à aussi son importance. On peut faucher de manière centrifuge. On commence au centre, vers l’extérieur.

De plus, on ne coupe pas toute la zone d’un seul coup.

Voyez par vous-même l’efficacité de la technique : 

En fonction de l’imagination, on peut même changer le paysage en créant des chemins tortueux, différents à chaque tonte.

Il existe aussi la technique de prairies fleuries, de l’éco-pâturage, des plantes vivaces (plutôt qu’annuelles), la taille des arbres à revoir, les haies libres et mellifères, la lutte biologique, etc.

Toutes ces techniques font gagner du temps. La prairie n’est fauchée qu’une à deux fois par an. La tonte est réduite à l’espace des allées, le désherbage peut se faire rapidement car les techniques de couvre-sol sont efficaces. Les haies sont moins taillées, de nombreux achats de produits sont annulés (ça fait de grosses économies) et les machines sont moins sollicitées… et j’en passe.

En tout est pour tout, la gestion différenciée demande un temps de travail quasi équivalent à l’ancienne gestion. 

Mais il faut absolument que je vous parle de la communication.

4) La valorisation des espaces naturels

Peu importe ce que vous allez mettre en place, avant de faire quoi que ce soit en Gestion différenciée, il faut informer les usagers qu’il va y avoir du changement.

Lors de mon dernier projet de gestion différenciée dans un cimetière de 7 hectares, nous avons développé la gestion différenciée dans un cimetière. Si la communication n’avait pas été assez explicite, la démarche n’aurait pas été acceptée par certains usagers.

Ces dernières décennies, les cimetières étaient complètement bétonnés et la végétation n’y avait pas sa place. Il faut alors travailler en amont l’acceptation au changement. Sinon, certains usagers trouveront que le cimetière est à l’abandon lorsque des coquelicots poussent derrière les tombes !

Aujourd’hui ce cimetière est un halos de biodiversité fleuri dont la ville se félicite. Il y a même des visites scolaires et naturalistes pour découvrir cette zone à part entière. 

Alors voici mes 2 conseils primordiaux pour ne pas rater sa démarche :

  • Communiquer en amont sur la démarche : expliquer votre démarche, proposer une concertation avec les différents acteurs en amont et communiquer sur les progrès de cette zone une fois la démarche enclenchée.   
  • Tondre une bande de 40cm à 1m autour des allées, des routes, des passages pour favoriser l’acceptation.

Cela montre qu’on est passé, que ce n’est pas un site à l’abandon et non entretenu. 

Cela évite aussi que les herbes hautes se couchent sur le chemin et qu’il devienne potentiellement glissant.

Si vous souhaitez en savoir plus sur ces démarches ou vous former à la gestion différenciée, n’hésitez à me contacter sur l’école Blue Eco Formations.

Merci et à bientôt !

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